« La littérature est à la fois solitude et communion, descente au fond de soi et ouverture au monde des humains infiniment variés, infiniment semblables. »
« T’as beaucoup voyagé! » de s’exclamer mon interlocuteur, visiblement impressionné.
« Si peu » mime-je, franchement perplexe.
« Trêve de fausse modestie! » de trancher l’interloqué.
« T’as beaucoup voyagé! » de s’exclamer mon interlocuteur, visiblement impressionné.
« Si peu » mime-je, franchement perplexe.
« Trêve de fausse modestie! » de trancher l’interloqué.
Pourtant…Si je retiens bien une leçon des quelques aventures et nombreuses rencontres de mes trois dernières décennies de vie sur terre, c’est que plus j’en apprends – sur moi, l’autre, la vie... –, plus je comprends que je ne sais rien. Ou si peu. Pareil à l’astronaute ou l’alpiniste qui, au sommet de son art, prend toute la mesure de sa petitesse.
Petit bonhomme de chemin faisant, une pause – repoussée depuis longtemps déjà – s’impose, question de digérer les dernières allées et venues avant de mieux rédiger à leurs propos. Mais où aller? Il y a certes le plein air québécois, sur lequel nous reviendrons à coup sûr. Entre-temps, direction le temple des recueils et du recueillement : la bibliothèque.
Située au pied de la « haute » ville de Québec, à la frontière du « vieux » et du « nouveau » quartier St-Roch, la Bibliothèque Gabrielle-Roy s’avère un choix qui va de soi. Inaugurée au printemps 1983, l’institution culturelle la plus visitée de la Capitale Nationale offre un environnement riche et accueillant qui se distingue notamment des bibliothèques universitaires – dont le nombre et la diversité des collections compensent à peine la froideur des lieux. Ici : le tapis des planchers, les grandes baies vitrées, le chant de la chute même, qui monte du rez-de-chaussée; autant d’atouts qui assurent une ambiance tamisée propice à la détente, la recherche, la lecture, le recueillement, voire l’écriture des jeunes et moins jeunes.
La porte d’entrée franchie, un petit rouquin fait le tour du monde en quatre-vingt pages d’un atlas illustré 3D. Sur ma gauche, au-delà des nouveautés, le clodo de la rue Xi’an (!) passe quelques-uns des quatre cent quatre-vingt-dix-neuf périodiques en revue; sur son divan flanqué de plantes maison, on le croirait passé au salon. Dans l’escalier qui mène au deuxième étage, une lunatique trébuche, le nez dans son dernier…Harry Potter. Sur ses talons, une grande aux yeux en amande l’évite de justesse en protégeant soigneusement les douze briques qu’elle porte précieusement contre son sein.
À l’étage, une dame aux cheveux de neige fouille minutieusement les archives « génialogiques ». Entre deux rangées, une jeune femme repose ses jambes molles dans sa chaise roulante, immobilisée pour l’occasion devant les prouesses de Terry Fox, le Canadien. Plus loin, un grand timide contemple une à une les mille trois cent trente-quatre œuvres d’arts disponibles – des reproductions de « Grands Maîtres », pour la plupart. Sinon, les références, SVP? En arrivant « au troisième » tel qu’indiqué par la précieuse aide aux lecteurs, un aveugle sort à tâtons de l’ascenseur. Direction? La section multimédia, sans doute, riche de plus de trente mille documents -- vinyles, CD, VHS, DVD, etc. --, films inclus, du citron "Les voisins 2" au classique "Citizen Kane".
Voilà enfin ce que je cherchais : « Dictionnaire des symboles », de Chevalier et Gheerbrant. Un des deux cent vingt quelques milles livres que compte la bibliothèque. Des contes de Grimm ou d’Andersen aux Traités de Hume ou De Vinci, en passant par les récits de Monticone ou les mémoires de Chateaubriand, on trouve ici de tout, sur tout. Les « Esclaves de l’amour », nouvelles du Norvégien Knut Hamsun, ou encore « La kulture en abrégé », essai du poète Ezra Pound; des guides de voyage sur l’Arctique, l’Asie, la Patagonie; des romans exotiques portugais, maltais, antillais; des contes érotiques africains, guadeloupéens; des analyses géopolitiques amères, acerbes; des ouvrages scientifiques de musicologie, numérologie, orfèvrerie…; des BD européennes, québécoises même; et que sais-je encore? Si peu, trop, y compris les chef-d’œuvres québécois, de VLB à Gérald Tremblay, qu’il me reste encore à découvrir.
Bref, tout ce qu’il faut pour instruire et divertir les quarante et quelques milles abonnés et tous les autres qui ne font que passer. Comme les soixante-treize mille cinq cent huit participants aux huit cent quatre-vingt-trois activités d’animation de 2006 : spectacles, conférences, soirées de contes...plus vingt-huit expositions visuelles, dont la dernière qui exposait noir sur blanc la richesse de l’entraide en milieu défavorisé.
L’auteure de Bonheur d’occasion et de La détresse et l’enchantement aurait de quoi être fière.
Je le suis.